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Entrevue

ENTREVUE AVEC MADAME JULIE-ANNE RICHARD

Par Daniel St-Pierre

Pour cette édition du printemps du journal L’Écoute, nous voulions souligner l’arrivée prochaine de la Fête des mères. Nous avons donc pensé vous faire connaître une maman handicapée visuelle de la région.

Daniel : Bonjour madame Julie-Anne Richard. Puisqu’on fait une entrevue spéciale à thématique Fête des mères, je dois vous demander… Êtes-vous maman?
Julie-Anne : Oui je suis maman de trois enfants.
Daniel : Maman de 3 enfants, et ils ont quel âge ?
Julie-Anne : Ce sont trois filles. La plus jeune a 15 ans, celle du milieu a 21 ans et la première a 24 ans.
Daniel : Avez-vous un handicap visuel ?
Julie-Anne : Oui, j’ai un handicap visuel qui a été diagnostiqué en 2015 et qui est dégénératif. Au départ ce n’était pas si mal, mais là, je suis vraiment rendue handicapée visuelle.
Daniel : Est-ce que c’est la dégénérescence maculaire ou la rétinite pigmentaire?
Julie-Anne : C’est la rétinite pigmentaire.
Daniel : Depuis quand avez-vous ce handicap?
Julie-Anne : Ça a été diagnostiqué en 2015, cela fait un an et demi déjà que je ne conduis plus ma voiture, donc c’est là que ça devient plus compliqué d’être maman.
Daniel : Quels défis cela peut vous amener dans votre rôle de mère d’avoir ce handicap ?
Julie-Anne : C’est beaucoup de trouver des personnes pour assumer les tâches que je ne peux plus faire auprès de mes filles, surtout la plus jeune. Les deux grandes ont leurs permis de conduire et sont autonomes. Mais pour la plus jeune, il y a beaucoup d’aller chercher et d’aller reconduire, faire de l’aide aux devoirs, des choses comme ça, où là ça ne peut plus être moi. Le défi, c’est vraiment de trouver des personnes pour le faire à ma place et pour m’appuyer là-dedans.
Daniel : J’imagine que vous avez un peu d’aide de votre famille…
Julie-Anne : Oui, c’est sûr, la plus vieille habite encore ici, quand mon conjoint est absent pour le travail, c’est elle qui va me remplacer avec la voiture ou auprès des devoirs.
Daniel : Est-ce que vous trouvez ça plus difficile d’avoir ce handicap avec votre plus jeune de 15 ans, ou vous imaginez que ça aurait été autant de travail avec un enfant plus jeune?
Julie-Anne : Je pense que ça aurait été pire avec un enfant plus jeune, en ce sens qu’il y a plus de tâches, ils ont besoin de plus de soin et c’est plus compliqué. Aller à la garderie avec la poussette, j’aurais foncé partout avec la poussette. Ça aurait été beaucoup plus compliqué. Ma fille de 15 ans est très autonome dans ses déplacements. Lors des plus grandes distances, je deviens un peu plus un fardeau qu’autre chose. C’est très difficile d’accepter qu’on ait besoin d’aide, de demander et parfois de l’exiger, car on n’a pas le choix, sans culpabilité.
Daniel : Est-ce qu’il y a des programmes ou de l’aide à domicile que vous utilisez pour vous aider avec vos conditions?
Julie-Anne : Non, pas du tout. Je n’ai pas d’aide à ce niveau. Mes trois enfants sont avec des traits autistiques, dont deux qui sont diagnostiquées Asperger, donc le Taxibus n’est pas accessible pour elles et le transport en commun non plus. Elles ont trop peur des étrangers. Ça vient ajouter de la pression.
Daniel : Est-ce que cela vous pose un défi supplémentaire d’avoir votre handicap visuel à gérer en plus de l’autisme de vos enfants?
Julie-Anne : Oui, c’est sûr que ça fait deux problématiques où est-ce qu’il y a beaucoup d’énergie à mettre afin de continuer de vivre une vie normale et fluide. C’est des choses pour s’enfarger facilement, et c’est un fardeau supplémentaire, mais elles sont extraordinaires.
Daniel : C’est sûr que ça doit demander beaucoup d’adaptation au quotidien…
Julie-Anne : Oui, c’est continu.
Daniel : Je voudrais vous demander aussi, quels sont vos plus beaux souvenirs de parents, vos plus grandes fiertés ?
Julie-Anne : C’est justement d’avoir des enfants autistes, ou avec traits autistiques prononcés qui vivent une vie normale, et que je suis avec mon conjoint, à les accompagner tellement partout. Elles ont pu atteindre plein d’objectifs d’études, car on était présents. Quand j’ai dû arrêter de travailler à cause de mon handicap, j’ai pu me concentrer sur ma vie de mère. C’était un des côtés positifs de la rétinite pigmentaire, donc j’ai pu être présente pour mes enfants qui n’étaient pas encore diagnostiqués autistes, mais qui demandaient des besoins particuliers.
Daniel : OK, donc ça a quand même permis d’être plus présente auprès de vos enfants.
Julie-Anne : Oui, moi je vois le positif, et ça, c’est positif.
Daniel : C’est super, c’est un bon point pour être résilient. Je vous félicite, c’est inspirant de vous voir continuer et de prendre ça positivement. Franchement, je vous lève mon chapeau.
Julie-Anne : Ça me fait plaisir. Il faut toujours être positif, sinon on devient un fardeau pour les autres.
Daniel : D’être positif, ça donne vraiment plus le goût d’aider les gens.
Julie-Anne : Absolument.
Daniel : Merci beaucoup pour cette belle discussion, madame Richard. C’est tout pour mes questions. C’était bien agréable d’apprendre à vous connaître. De la part de toute l’équipe du Journal L’Écoute, nous souhaitons une excellente Fête des mères à toutes les mamans du monde.
Julie-Anne : Merci beaucoup!