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UN HOMME AVEUGLE RÉCUPÈRE PARTIELLEMENT LA VUE GRÂCE À L'OPTOGÉNÉTIQUE

Par Article provenant du site web de Radio-Canada en date du 25 mai 2021

La vision d'un Français complètement aveugle a été partiellement restaurée grâce à des protéines d’algue sensibles à la lumière introduites dans l’un de ses yeux à l’aide d’une thérapie optogénétique.

L’optogénétique est un domaine de recherche qui existe depuis une vingtaine d’années. Elle permet de rendre des neurones sensibles à la lumière en combinant le génie génétique et l’optique. En gros, la thérapie optogénétique permet de modifier génétiquement des cellules afin qu’elles produisent des protéines sensibles à la lumière.

À ce jour, elle est surtout associée à la recherche fondamentale en neurosciences, particulièrement pour l’étude du fonctionnement des circuits neuronaux.

Dans les présents travaux, elle a été utilisée pour rétablir la capacité d’un œil à détecter la lumière.

C’est la première fois que « cette approche innovante est utilisée chez l’homme et que ses bénéfices cliniques sont démontrés », expliquent dans un communiqué les chercheurs José-Alain Sahel et Botond Roska de Sorbonne Université.

« Ce résultat marque une étape importante dans le développement de thérapies géniques […] pour traiter les dégénérescences rétiniennes héréditaires », ajoutent les auteurs de ces travaux publiés dans la revue Nature Medicine (en anglais).

Repères :
• La rétinite pigmentaire désigne un groupe de maladies causées par des mutations dans plus de 71 gènes différents.
• Ces maladies portent atteinte aux cellules photosensibles de la rétine et entraînent une perte de vision graduelle, à mesure que ces cellules meurent.
• Ses symptômes ne se manifestent pas au même moment chez les personnes qui en sont atteintes, mais la maladie est présente dès l’adolescence et progresse tout au long de la vie.
• Les premiers symptômes sont habituellement une perte de la vision la nuit et de la vision périphérique.
• Elle frappe plus de 2 millions de personnes dans le monde.

Traiter les photorécepteurs
L’objectif des chercheurs était donc de montrer qu’une thérapie peut traiter les « maladies héréditaires des photorécepteurs, qui sont des causes très répandues de cécité ».
Dans le cas du participant à cette étude, les médecins lui avaient diagnostiqué il y a 40 ans une rétinite pigmentaire. Cette maladie, qui frappe 2 millions de personnes dans le monde, entraîne la mort des cellules sensibles à la lumière à la surface de la rétine.
L’homme n'avait plus aucune vision depuis 20 ans.

Il faut savoir que les photorécepteurs sont « des cellules de détection de la lumière dans la rétine qui utilisent des protéines (appelées opsines) pour fournir des informations visuelles au cerveau via le nerf optique ».

La technique utilisée est basée sur des protéines produites dans les algues, appelées « channelrhodopsines », qui modifient leur comportement en réponse à la lumière. Les bactéries les utilisent pour se déplacer vers la lumière.

L’équipe de recherche a utilisé la thérapie génique pour exprimer des « channelrhodopsines » dans les cellules ganglionnaires de la rétine. De plus, elle a introduit le gène codant pour les « channelrhodopsines », appelé ChrimsonR. Cette opsine détecte la lumière ambrée, plus sûre pour les cellules rétiniennes que la lumière bleue utilisée pour d’autres types de recherche optogénétique.

En outre, des lunettes spéciales équipées d’une caméra ont été conçues par les chercheurs. Elles permettent de produire des images visuelles projetées en images de couleur ambre sur la rétine.

Le patient a porté ces lunettes munies d'une caméra vidéo à l'avant et d'un projecteur à l'arrière, afin de voir ce qui se passait devant lui et d'en projeter une version dans la bonne longueur d'onde.
Des mois d’ajustement ont été nécessaires pour que des niveaux suffisamment élevés de rhodopsines s'accumulent dans l'œil et que le cerveau du patient apprenne ce « nouveau langage ».

« Permettre à une personne de retrouver une vision partielle par l’optogénétique n’aurait pas pu se faire sans l’engagement du patient », explique le Pr Sahel.

Ce n’est que cinq mois après avoir reçu l’injection de ChrimsonR, laissant ainsi le temps à son expression de se stabiliser dans les cellules ganglionnaires, que les tests avec les lunettes ont pu débuter.

Sept mois plus tard, le patient a commencé à rapporter des signes d’amélioration visuelle. Avec l’aide des lunettes, il peut désormais localiser, compter et toucher des objets. L'homme n'a pas une vue parfaite, mais la différence entre l'absence de vision et une vision même limitée peut changer la vie, estiment les chercheurs.

Vers un traitement
« Les personnes aveugles atteintes de différents types de maladies neurodégénératives des photorécepteurs seront potentiellement admissibles au traitement, mais il faudra du temps pour que cette thérapie puisse être proposée », notent les auteurs. Des scientifiques américains et suisses ont également participé à ces travaux.

Source : https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1795911/therapie-optogenetique-homme-vision?fbclid=IwAR0AXeBWL0Zk84fr1O0rMGB6F0JX1QPYqY35QlEn_DFuILXtz38OSUkvzHY