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Entrevue

TROIS GÉNÉRATIONS NOUS PARLENT DE L'APHV-BSL

Par Huguette Vigneau et transcrite par Éric Côté

À l’occasion du 30e anniversaire de l’APHV-BSL, nous avons choisi d’inviter 3 personnes handicapées visuelles à nous partager l’expérience de leur participation au sein de notre organisme. C’est Huguette Vigneau, directrice de l’APHV-BSL, qui a réalisé l’entrevue pour cette édition du journal. Elle s’est entretenue avec trois personnes de générations différentes, soit : Madame Monique Bélanger ainsi que messieurs Gino Soucy et Émile Proulx. Voici le résumé de cette entrevue.

Premièrement nous avons demandé à nos trois invités de nous dire leur âge et de nous décrire brièvement leur déficience visuelle. Gino Soucy a 55 ans, il nous explique qu’il a perdu une partie de sa vision en 1983 à la suite d’un accident. Il ne voit plus de l’œil gauche et son œil droit est égratigné, ce qui cause un effet de brouillard. Malheureusement, aucune lunette ne peut corriger sa vue. Il a quand même réussi à fonctionner tout ce temps.
Émile Proulx a 32 ans, il nous explique qu’il a eu un décollement de rétine dans les deux yeux à l’âge de neuf ans. Il a eu quatre opérations à l’œil droit qui n’ont rien donné, alors il ne voit plus de cet œil. Il lui reste environ 30% à l’œil gauche, ce qui lui donne assez de vision pour qu’il puisse fonctionner et travailler.
Monique Bélanger a 89 ans, elle nous explique qu’elle a reçu un premier diagnostic de dégénérescence maculaire il y a dix-huit ans. Au début elle était peu incommodée, mais progressivement sa vision dégénère. Elle reçut aussi un diagnostic de dégénérescence de la cornée, alors les deux pathologies s’additionnent. Elle ne conduit plus depuis cinq ans et son plus gros deuil est de ne plus reconnaître les gens qu’elle rencontre. « Dans la vie courante, je me débrouille bien. J’ai l’impression de toujours vivre dans la brume, tout est flou. Je manque de précision, c’est pour ça que j’ai de la difficulté avec les visages », nous dit-elle. Elle rajoute qu’elle a des bons appareils qui lui permettent de fonctionner de façon satisfaisante.

Par la suite, nous leur avons demandé ce qui les a amenés à participer à l’APHV-BSL. Madame Bélanger nous raconte avoir entendu parler de l’Association lorsqu’elle était à Matane. Elle s’impliquait au sein d’autres organismes et elle a entendu parler de l’Association. Elle a participé à quelques rencontres qu’elle trouvait sympathiques. Puis, lorsqu’elle est arrivée à Rimouski, elle ne connaissait pas d’autres organismes, alors l’APHV-BSL, lui permettait de « mettre un pied à terre », comme elle le dit si bien. Graduellement, elle s’est mise à participer aux activités, aux Assemblées générales annuelles, en plus de rencontrer les gens sur le conseil d’administration, alors elle s’est laissé embarquer, nous dit-elle en riant. Elle en est à sa quatrième année au sein du conseil.

Au tour de Monsieur Proulx qui nous explique avoir rencontré Huguette Vigneau et Pierre-Paul Richard, qui était président à l’époque, lors d’un kiosque d’information tenu à son école. Ce n’est que quelques années plus tard que monsieur Proulx s’est intéressé à l’Association, alors qu’il était étudiant au cégep de Rimouski en Technique de travail social. C’est à ce moment qu’il a commencé à s’impliquer davantage, ce qui l’a mené à réaliser un stage à l’Association. Il souligne que lorsque c’est possible, il essaie de participer à nos activités.
Pour ce qui est de monsieur Soucy, la première fois qu’il a entendu parler de l’Association, c’est lors d’un cours d’informatique à Formation CLÉ Mitis / Neigette. Une étudiante à cet endroit lui a parlé des rencontres de groupes à l’APHV-BSL, elle lui a proposé de participer à une rencontre. À l’époque, monsieur Soucy demeurait à Les Hauteurs, mais il essayait de s’impliquer lorsqu’il pouvait. Maintenant, il vit à Rimouski depuis cinq ans et il est membre du conseil d’administration. « Je vais à toutes les activités et ça m’aide beaucoup. C’est un organisme qui est là pour nous aider et c’est un gros plus pour moi », nous dit-il.

Nous avons aussi demandé à nos trois invités qu’est-ce qu’ils ont trouvé à l’APHV-BSL. Pour madame Bélanger, c’était un véritable encouragement de côtoyer des personnes handicapées visuelles qui continuaient à avoir une vie significative en participant à des activités. Elle dit avoir trouvé un espoir, car même si elle perdait graduellement la vue, c’était possible de garder le goût de vivre. Madame Bélanger s’implique aussi sur le conseil d’administration de l’Association, en plus d’écrire la chronique généalogie de notre journal. Monsieur Soucy nous explique qu’avant de connaître l’Association, il se sentait gêné lorsqu’il allait à certains endroits. Maintenant, il sent l’appui des gens comme lui, ce qui a contribué à le rendre plus à l’aise et l’aide à fonctionner comme tout le monde. Il apprécie le fait de participer à des activités comme les cafés-rencontres ainsi que le PHVA (Personnes handicapées visuelles en action). Lorsqu’il est parti de son village pour venir à Rimouski, il a dû apprendre à s’adapter, notamment avec les transports en commun, alors il a senti l’appui de l’Association. Il s’implique aussi bénévolement lors des activités de groupe ainsi qu’aux kiosques d’information avec Éric Côté, agent de sensibilisation.

Quant à Monsieur Proulx, il nous mentionne avec humour que lorsqu’il a commencé à participer à l’Association, il a trouvé qu’il y avait beaucoup de grand-mamans dans les activités. Il nous dit que c’est un gros milieu de vie où l’on rencontre des gens de tous âges, des personnes encore actives, des travailleurs, etc. « Une perte de vision, c’est loin d’être une finalité. On fait juste continuer et trouver des manières de fonctionner et d’arrêter de se remettre en question. Ça amène une confiance qui peut être difficile en situation de handicap », dit-il. Monsieur Proulx rajoute aussi qu’il aime le monde et qu’il aime voir des gens différents participer à des activités. Il aime partager son vécu et apprendre du vécu des autres. Avec le temps, il a aussi appris à devenir proactif avec ses employeurs et il ne se gêne pas pour exprimer ses besoins. Il a travaillé quelques semaines à l’Association, afin de créer les trois capsules vidéo qui sont sur notre site. Il est aussi très actif en faisant du vélo et même du ski alpin, mais en faisant très attention! Il trouve cela important de s’impliquer afin de faire changer les structures sociales. Il rajoute par la suite qu’il a connu un peu l’APHV-GIM (Gaspésie / Îles-de-la-Madeleine), lorsqu’il était en Gaspésie. Comme il avait neuf ans à l’époque, ce sont plus ses parents qui ont bénéficié des conseils de cette Association.

Pour conclure l’entrevue, nous avons demandé à nos trois invités ce qu’ils souhaitent à l’Association pour son 30e anniversaire. Monsieur Proulx nous souhaite un autre trente ans! Il souhaite une plus grande visibilité pour l’Association, un partenariat avec les différentes instances municipales et gouvernementales, une participation active, mais surtout, de continuer ce que l’on fait déjà. Monsieur Soucy trouve que l’Association a pris de l’ampleur avec les années, par exemple l’activité PHVA qui est allée rejoindre d’autres personnes. Il trouve ça beau de voir que beaucoup de gens s’impliquent et que notre participation sociale nous fait connaître plus de la population. Il souhaite que ça continue ainsi avec de nouvelles idées et de nouvelles personnes. Madame Bélanger souhaite ardemment de continuer ainsi. Elle souligne l’importance d’avoir une plus grande participation sociale, de continuer notre collaboration avec les autres organismes. Puis elle souhaite aussi plus de ressources afin d’offrir davantage de services aux personnes handicapées visuelles. Nous remercions nos trois invités d’avoir accepté de partager leur expérience et nous croyons que cela peut inspirer d’autres personnes à s’impliquer davantage à l’Association. Merci beaucoup, bonne continuité dans vos implications et bonne chance dans vos projets personnels.