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Entrevue

AVEC MARIE-SOLEIL LAGACÉ ET GUILLAUME BALLANDO

Réalisée et transcrite par Éric Côté

Pour l’entrevue du journal, nous nous sommes entretenus avec Guillaume Ballando, qui est de nationalité française, et sa conjointe Marie-Soleil Lagacé, qui est la fille de notre intervenante Nadia Gagnon. Ils nous ont expliqué le processus d’immigration de Guillaume, qui a obtenu depuis peu son statut de Résident permanent canadien. Cela peut sembler facile quand on en entend parler dans les médias, mais les démarches qu’ils ont dû faire en a fait voir de toutes les couleurs à ce jeune couple et à leur famille. Voici le résumé de cette entrevue.

C’est avec enthousiasme que le jeune couple nous dit aller bien aujourd’hui. Ils se sont rencontrés à Rimouski en 2015, lors d’une fête donnée par une amie en commun et juste avant que Guillaume retourne en France. Le hasard fait bien les choses : « Il partait en voyage vers l’Ouest canadien, puis il avait l’intention de retourner en France par la suite. Nous nous sommes rencontrés dans le dernier moment où nous pouvions nous rencontrer. Finalement, il n’est pas retourné en France »!, raconte Marie-Soleil en riant.

Guillaume est venu ici pour la première fois en septembre 2011 et depuis, il a enchainé les visas de toutes sortes jusqu’à aujourd’hui, pour finalement obtenir son statut de Résident permanent en octobre 2018. Nous lui avons demandé qu’il nous explique ce que ça signifie « Résidence permanente » et quelles étaient les étapes pour y arriver. C’est un processus assez long et compliqué, d’autant plus que le couple a fait la demande pendant que le ministère faisait la transition vers l’informatisation des documents. « Ça a compliqué encore plus le processus, ils ont perdu le dossier une couple de fois. Ils ont oublié de fournir des documents qu’il fallait que je leur envoie. Mon visa arrivait à échéance et je n’avais pas le choix, c’était maintenant qu’il fallait que je le fasse », nous raconte Guillaume. Pour en rajouter sur la gamme d’émotion, Marie-Soleil nous explique les grandes lignes qui l’ont mené à faire une demande de parrainage. D’abord en août 2016, Guillaume voulait retourner aux études en ébénisterie. Cependant, son visa « Étude-travail » arrivait à échéance. Il a demandé un autre visa d’étude sauf que ça lui était toujours refusé par le gouvernement provincial. Il ne lui restait qu’une semaine à son visa, alors il n’avait plus le choix, il devait retourner en France. Mais le couple voulait rester ensemble, alors ils se sont rendus à un centre d’immigration aux frontières des États-Unis. « C’était probablement une des journées les plus stressantes qu’on a vécues pendant les démarches » nous dit Marie-Soleil. Rendus aux frontières, ils ont fait ce qu’on appelle le « tour du poteau », ce qui signifie entrer aux États-Unis et revenir au Canada. Ils ont expliqué aux agents de la douane que Guillaume avait besoin d’un visa quelconque pour pouvoir rester au Canada. À ce moment, il ne restait que deux jours à son visa. L’agent de la douane leur a dit que la seule solution pour eux, c’était de faire une demande de parrainage avant la fin du visa. Pendant ces démarches, Guillaume avait le droit de rester au Québec durant les procédures. On appelle ça le « Statut implicite ». Cependant il n’avait pas le droit de travailler, ni de retourner aux études. Comble du stress, lorsqu’ils ont imprimé les formulaires nécessaires, ils ont découvert que ça prenait la signature d’un notaire et trouver un notaire en quarante-huit heures n’est pas une chose facile. La demande de parrainage a duré d’août 2016 jusqu’à octobre 2018, ce qui fait un peu plus de deux ans sans travailler, ni étudier.

Pendant ce temps, ils ont dû remplir des formulaires faisant partie d’une trousse et souvent il en manquait que le gouvernement oubliait d’inclure. Alors ils découvraient au fur et à mesure qu’il manquait des documents. Ils devaient sans cesse retourner la trousse. Une fois cette étape franchie, le gouvernement canadien leur a dit qu’ils devaient ensuite faire une demande au gouvernement provincial.
Guillaume a dû passer ensuite des tests médicaux pour vérifier qu’il n’a aucune maladie grave, par exemple VIH, tuberculose, etc. Par la suite, ils ont vérifié les antécédents criminels, soit de la France et du Canada, et ce, pour les dix dernières années. Dépendant des cas, ils peuvent vérifier la validité de la relation de couple, mais dans leur cas, ce n’était pas nécessaire. Après toutes ces démarches, Marie-Soleil a finalement été acceptée comme « parrain » et depuis octobre 2018, Guillaume à un statut de résident permanent. Il peut maintenant travailler, aller aux études, il a droit d’avoir un permis de conduire et une carte d’assurance maladie.
Nous avons demandé à Guillaume quelle était la différence entre résident permanent et citoyenneté canadienne. Il nous dit que c’est exactement la même chose sauf qu’il n’a pas encore le droit de vote et il n’a pas de passeport canadien. Cependant, il conserve son passeport français et il peut quand même aller en France, mais pas plus de 180 jours, sinon ils révoqueront son statut de résident permanent, car ils considèrent qu’il n’est pas ici plus de la moitié du temps de l’année.

Par la suite, nous avons demandé comment ils ont fait pour passer à travers cette épreuve. Guillaume nous répond que toute cette démarche est très compliquée parce que c’est du discours très bureaucratique et que c’est parfois difficile à comprendre. Ils ont dû avoir recours à un avocat en immigration qui réside à Montréal, ce qui complique encore un peu les démarches. Ils ont aussi demandé l’aide de l’adjointe au député du NPD Guy Caron. « Elle a une ligne parlementaire donc elle peut aller chercher l’information directement à la source et nous tenir au fait de comment évolue le dossier », explique Guillaume. Ce n’est pas toujours facile à comprendre pour quelqu’un qui parle français, alors nous imaginons à quel point cela peut être encore plus difficile pour une personne qui ne parle pas notre langue. Nous avons demandé au couple si tout ça a eu un impact sur la vie de famille. Le couple nous mentionne qu’ils ont vécu beaucoup de stress et d’anxiété qui se répercute sur la famille de Marie-Soleil, car c’est très communicatif. Heureusement il n’y a pas eu de grosse cassure. « Ce qui est le plus dure, nous dit Marie-Soleil, c’est qu’on se rend compte à quel point on est libre quand on est citoyen au Québec. Guillaume ne pouvait pas étudier ni travailler, il était juste coincé. On se rend compte de cela quand on en est privé ». Ils ont donc eu une prise de conscience sur cette liberté et ont réalisé que cette épreuve les a fait grandir.
Nous leur avons demandé qu’est-ce qu’ils feraient autrement si c’était à refaire. Ils nous ont répondu qu’ils auraient été tout de suite chercher un avocat en immigration ainsi que l’aide du député. Cela aurait été plus rapide, plus facile et aurait causé moins d’anxiété. Guillaume nous explique qu’il avait déjà fait des démarches auparavant pour obtenir son visa PVT (permis vacance travail) ainsi que son visa touristique. Il prenait pour acquis que c’était relativement simple, car tout s’était bien passé, mais cette fois-ci c’était différent. « J’ai eu la chance d’être Français quand même, parce qu’il y a des ententes entre la France et le Québec. Ça a simplifié les choses », nous dit Guillaume. Marie-Soleil rajoute en blaguant qu’elle était bien seulement la fin de semaine, car elle savait que les fonctionnaires ne travaillaient pas!

Pour conclure l’entrevue, ils nous disent de ne pas hésiter d’aller voir notre député, pour n’importe quoi, qu’ils ont les ressources nécessaires et que ça ne coûte rien. Pour ce qui est de l’avocat, ça prend un certain budget, mais ça vaut la peine et ça facilite les choses. Marie-Soleil rajoute : « Quand vous voyez à la télévision des immigrants illégaux, gardez toujours à l’esprit que ce n’est pas facile les démarches et que c’est très dur ce qu’ils vivent ». Pour terminer, nous remercions Guillaume Ballando et Marie-Soleil Lagacé d’avoir accepté de nous accorder cette entrevue. Ils sont un bel exemple de courage, de perspicacité, de persévérance et d’amour aussi. Au nom de l’Association, nous souhaitons bienvenue à Guillaume.

Voici les définitions des termes utilisés dans l’entrevue.

La résidence permanente :
Une personne ayant légalement immigré au Canada, mais qui n’est pas encore citoyen canadien.

Les résidents permanents ont le droit :
• à la plupart des avantages offerts aux citoyens canadiens, y compris la couverture des soins de santé;
• d’habiter, de travailler ou d’étudier n’importe où au Canada;
• de demander la citoyenneté canadienne;
• de bénéficier de la protection des lois canadiennes et de la Charte canadienne des droits et libertés.

Les résidents permanents doivent payer des impôts et respecter toutes les lois canadiennes à l’échelle fédérale, provinciale et municipale.

Les résidents permanents n’ont pas le droit :
• de voter ou de se présenter à une élection;
• d’occuper un emploi qui requiert une autorisation de sécurité de haut niveau.

La Citoyenneté canadienne :
Processus officiel permettant à une personne qui n’est pas citoyen canadien de le devenir. La personne doit habituellement devenir d’abord résident permanent.

Visas :
Une vignette officielle délivrée par un bureau des visas à l’étranger et insérée dans le passeport de la personne concernée pour démontrer qu’elle satisfait aux exigences relatives à l’admission au Canada en tant que résident temporaire (visiteur, étudiant ou travailleur). Une vignette est un autocollant spécialement conçu sur lequel les bureaux à l’étranger impriment des renseignements.
Parrainage :
Lorsque vous acceptez de parrainer une personne, vous devez signer un engagement, dans le cadre duquel vous promettez de subvenir financièrement aux besoins essentiels de votre époux ou de votre partenaire ainsi qu’à ceux de ses enfants à charge.

Source : https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/services/nouveaux-immigrants/carte-rp/comprendre-statut-rp.html